« Étude de marché » vs « État local de marché », bien faire la différence pour sécuriser son implantation

Nous l’observons régulièrement sur le terrain, une confusion persiste chez de nombreux futurs franchisés et même dans certains sièges. Si le premier relève d’une obligation d’information encadrée par la loi, le second est un travail d’analyse et de modélisation à l’initiative du porteur de projet. Ne pas distinguer les deux, peut exposer à des malentendus… […]
Antoine Bertheas
ELM ou étude de marché ? Faites la bonne analyse pour votre franchise commerciale

Nous l’observons régulièrement sur le terrain, une confusion persiste chez de nombreux futurs franchisés et même dans certains sièges. Si le premier relève d’une obligation d’information encadrée par la loi, le second est un travail d’analyse et de modélisation à l’initiative du porteur de projet. Ne pas distinguer les deux, peut exposer à des malentendus… et parfois à du contentieux. Voici donc quelques conseils pratiques pour être au clair sur le sujet.

Deux objets, deux finalités

Légalement, le franchiseur doit remettre au candidat un document d’information précontractuelle (le fameux DIP) au moins vingt jours avant toute signature. Le contenu de ce DIP est fixé par décret, il comprend notamment « la présentation de l’état général et local du marché (…) et des perspectives de développement » du secteur concerné.

Autrement dit, l’ELM est une photographie objective du marché dans la zone considérée et de son environnement.

A contrario, concernant l’étude de marché, la Cour de cassation a rappelé qu’aucun texte n’impose au franchiseur de fournir une « étude du marché local », l’obligation portant sur un état du marché et de ses perspectives (voici le texte pour les plus courageux).

L’ELM n’a donc ni la vocation ni le niveau de granularité d’une étude chiffrant un chiffre d’affaires ou simulant une part de marché !

Il est d’ailleurs régulièrement rappelé, notamment par Bpifrance, que l’ELM ne remplace pas l’étude de marché. Le candidat doit réaliser la sienne, adaptée au site pressenti, pour affiner ses hypothèses commerciales et financières.

« Non, l’état local de marché exigé dans le DIP n’est pas une étude de marché prédictive. »

Concrètement, que contient l’ELM ? Et que couvre l’étude de marché ?

Mais alors Antoine, me dites-vous, que contiennent précisément ces documents ?

Voilà le topo :

ELM : une base factuelle, datée et sourcée.

  • Périmètre : la zone de chalandise visée et son contexte (démographie, mobilité, revenus, morphologie commerciale).
  • Offre en présence : concurrence directe et indirecte, densités d’équipement.
  • Demande : signaux objectifs (population, fréquentation, bassins d’emploi, pôles générateurs).
  • Perspectives : tendances sectorielles utiles au lecteur du DIP (évolution du segment, dynamiques locales).

Ce travail doit vous permettre de vous faire une idée claire, sans glisser vers la promesse de performance.

D’ailleurs, les décisions de justice sanctionnent surtout les insuffisances ou présentations trompeuses du DIP, pas l’absence de business plan.

Étude de marché : un travail d’aide à la décision.

  • Hypothèses d’implantation : localisation précise, visibilité, accessibilité, volumes de flux.
  • Analyse fine de la demande : profils clients, panier moyen attendu, saisonnalité.
  • Concurrence et parts de marché : positionnement-prix, différenciation.
  • Modélisation : chiffre d’affaires prévisionnel, scénarios (central, bas, haut), sensibilité au loyer et à la masse salariale.
  • Plan d’action local : mix marketing d’ouverture, ramp-up, recrutement.

Par nature, l’étude de marché s’appuie sur des méthodes (benchmark, comptages, données fiscales/INSEE, enquêtes, etc.) et aboutit à des projections qui restent de la responsabilité du porteur de projet uniquement.

Pourquoi la confusion entre ELM et étude de marché peut coûter cher

Tout d’abord, un DIP incomplet (ELM absent ou mal fichu) peut fragiliser la relation franchiseur-candidat/franchisé et nourrir d’éventuels litiges ultérieurs.

Les juridictions apprécient généralement au cas par cas la sincérité et la complétude de l’information fournie.

Mieux vaut donc clairement un ELM sobre, précis et référencé qu’un document « marketing ».

Aussi, si vous prenez l’ELM pour une étude prévisionnelle, il y a de fortes chances que vous surestimiez le potentiel d’un site ou sous-anticipiez les contraintes (loyer, saisonnalité, cannibalisation).

Pour cela, suivez cette règle très simple : ELM = point de départ, étude de marché = décision d’engagement.

Enfin, cette confusion peut entrainer un risque opérationnel pour le réseau, avec des formats d’ELM hétérogènes qui entrainent des retards, relectures et autres incompréhensions.

« Mon conseil : standardisez cette étape au maximum pour fluidifier la relation siège-terrain et sécuriser la promesse faite au candidat. »

La bonne méthode pour bien utiliser les deux, au bon moment

1. Cadrez l’ELM « socle » en amont du recrutement

Grâce à un outil dédié comme Mygeomarket, définissez un modèle d’ELM commun à tout le réseau : périmètre, indicateurs minimums (démographie, emploi, revenus médians, densité d’offre, projets urbains…), sources datées, cartes et photographies. Évitez également toute mention chiffrant une performance future et renvoyez justement à l’étude de marché pour ces prévisions.

Grâce à Mygeomarket, vous pouvez créer un ELM en 2 minutes !

2. Au moment du DIP, respectez le fond et le délai

Faites très attention à la remise 20 jours avant signature (ou avant tout versement). Il s’agit d’un délai légal qui conditionne réellement la valeur du consentement du candidat.

3. Avant le choix du local, lancez l’étude d’implantation

Dès qu’un local précis est identifié, l’étude doit affiner : flux piétons/voitures, visibilité, contraintes techniques, loyer et charges, cannibalisation intra-réseau, chiffre d’affaires prévisionnel et plan d’actions des 100 premiers jours. Bien évidemment, vous l’aurez compris, il s’agit d’un exercice séparé de l’ELM 😉.

4. Bouclez la boucle après ouverture

Après ouverture profitez-en pour comparer réel vs prévisionnel et en tirer un maximum d’informations utiles : trafic réel, panier, mix produits, saisonnalité, etc. Ce retour d’expérience alimentera la prochaine étude… et améliorera la qualité des futurs ELM du réseau.

Grille pratique : reconnaître d’un coup d’œil l’ELM et l’étude

Besoin d’expliquer tout ça à la machine à café ☕ ? Voici une rapide grille récapitulative très pratique :

  • Finalité :
    • ELM : informer loyalement le candidat sur le contexte (obligation légale).
    • Étude : aider à décider d’ouvrir ici ou ailleurs (outil de gestion).
  • Contenu :
    • ELM : constats sourcés, perspectives sectorielles, zoning.
    • Étude : prévisions, sensibilités, business plan.
  • Responsabilité :
    • ELM : franchiseur (dans le DIP).
    • Étude : porteur de projet, avec ou sans cabinet/outil.
  • Calendrier :
    • ELM : avant la signature, ≥ 20 jours.
    • Étude : avant l’engagement financier (bail, travaux).

« L’ELM documente le terrain, l’étude modélise le potentiel. C’est cette articulation, plus que la sophistication des slides, qui réduira les litiges et augmentera la réussite de vos ouvertures. »


FAQ

L’ELM est-il obligatoire dans le cadre d’un contrat de franchise ?

Oui. Il figure dans le document d’information précontractuelle (DIP) et doit présenter l’état général et local du marché ainsi que ses perspectives de développement.

Quand l’ELM (via le DIP) doit-il être remis au candidat ?

Au moins 20 jours avant la signature du contrat (ou avant tout versement) afin de garantir un consentement avisé.

L’ELM remplace-t-il l’étude de marché ?

Non, jamais. L’ELM est une photographie informative exigée par la loi, alors qie l’étude de marché est un travail d’analyse et de prévision mené par le candidat (souvent avec l’aide du réseau/partenaires) pour décider de l’implantation et bâtir le business plan.

Qui a la responsabilité de réaliser l’étude de marché ?

Le candidat/franchisé (ou le réseau s’il l’accompagne). La jurisprudence rappelle qu’on peut mettre à la charge du candidat la réalisation d’une étude de marché/implantation, distincte de l’ELM.

L’ELM peut-il contenir un chiffre d’affaires prévisionnel ?

À éviter. L’obligation porte sur un état du marché, pas sur une étude locale prédictive. Les prévisions relèvent de l’étude du candidat. Si le franchiseur fournit malgré tout des prévisions, elles doivent être sincères et sérieuses.

Que risque un franchiseur si l’ELM est absent, imprécis ou trompeur ?

Un DIP « fragilisé » peut nourrir un contentieux (défaut d’information loyale). Les juges apprécient au cas par cas la sincérité et la complétude des informations fournies.

Que doit contenir, a minima, un ELM correct ?

Un bon ELM doit contenir un périmètre clair (zone de chalandise), des indicateurs factuels et datés (démographie, emploi, revenus, densité d’offre/concurrence) et des tendances sectorielles utiles au lecteur du DIP, avec sources explicites.

Existe-t-il un « format type » d’ELM ?

Le code du commerce ne donne pas de gabarit détaillé, mais il fixe les rubriques d’information du DIP et la mention de l’état général et local du marché. Les réseaux de franchises ont globalement intérêt à standardiser en interne un modèle d’ELM pour homogénéiser la qualité.

Comment articuler concrètement ELM et étude de marché dans le calendrier ?
  • ELM dans le DIP → remis ≥ 20 jours avant signature.
  • Étude de marché → menée avant tout engagement lourd (bail, travaux), à partir d’un local précis pour modéliser le CA prévisionnel et tester la sensibilité loyer/charges.
L’ELM peut-il être complété par des données locales publiques ?

Oui, et c’est souhaitable : statistiques INSEE, données des collectivités/RLP, documents d’urbanisme, etc., à condition de citer clairement les sources et la date de consultation.


Article mis à jour le 28/10/2025

Antoine Bertheas

Antoine Bertheas

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